Sans nouvelle de leurs proches les familles échangent entre elles des nouvelles, souvent recueillies auprès de la Croix-Rouge, plutôt rassurantes, mais souvent assez éloignées de la réalité :

« Les détenus politiques sont transformés en travailleurs. Exemple d’un camp de détenus civils :

Le camp de Weimar situé à 8 kilomètres de la ville en est relié par une voie ferrée et se trouve à 800 mètres d’altitude. Il comporte trois enceintes de fils de fer barbelés concentriques.
Dans la première ceinture, des prisonniers. Entre la première et la deuxième, usines et ateliers de travail. Entre la deuxième et le troisième, terrain où l’on exploite des carrières de graviers.
La première enceinte de barbelés est électrifiée et jalonnée de miradors en haut desquels se trouvent des hommes armés. Des SS gardent les usines et font des patrouilles la nuit avec des chiens. Le camp contient 20 000 prisonniers moitié français moitié étrangers et Allemand antinazis.

Le règlement du camp est le suivant :
4h30 lever, toilette surveillée le torse nu. Lavage du corps obligatoire,
5h30 2 ou 3 (illisible) de potage ou café avec 450 gr de pain, ration de pomme de terre si le pain est en moins grande quantité, 30 gr de margarine, une rondelle de saucisson ou un morceau de fromage,
12 heures 1 café,
18h30 un litre de soupe épaisse.

Le matin à 6 heures départ pour le travail. Etat sanitaire du camp très bon. A la tête se trouve le professeur Richet, déporté.
Visite médicale chaque jour. Il y a de nombreux médecins, une infirmière, et un hôpital. Les internés portent le costume des forçats allemands en drap artificiel. Relativement, tous les prisonniers sont d’accord pour trouver qu’à Weimar ils sont mieux qu’ils ne l’étaient à Fresnes et dans les autres prisons françaises.

Le bombardement de Weimar n’a fait aucune victime parmi les déportés du camp. »

(Notes manuscrites de la mère d’un déporté à Buchenwald)