« Le 11 avril 1945 à 2h de l’après-midi l’attaque des chars américains se déclenche en direction du camp, une fièvre intense règne ici depuis trois jours, nous sommes prêts à évacuer il n’y a plus de vivres dans le camp… Déjà des camarades sont partis sur la route… la liberté va-t-elle nous échapper ? Mais non ! Ils sont là, ils vont monter la colline avec leurs chars blindés la mitrailleuse crépite, nous suivons les mouvements des Allemands qui tentent une dernière fois de résister à l’assaut des Américains.

Ici, tous les camarades sont prêts à bondir sur les fusils, Français, Russes, Allemands, Polonais, Espagnols, Tchèques… Toutes les nations ont leurs sections prêtes à lutter jusqu’à la mort, à châtier l’oppresseur qui depuis des années les font souffrir en les affligeant de tous les maux, les contraignant à travailler sans nourriture, brutalisés, roués de coups dans ce bagne maudit que fut Buchenwald.

Tous ces hommes attendent, les nerfs tendus mais le visage calme.

Ah il faut avoir souffert pour avoir acquis la maitrise de soi, et le calme nécessaire pour réussir une telle entreprise, travail de longue haleine qui a demandé des jours et des jours de préparation. La moindre imprudence aurait pu entraîner dans la mort des milliers de camarades mais le fanatisme est entré en nous, nous en avons assez. Cela doit finir.

Le sang va couler peut-être mais peu importe. Il s’agit de conquérir notre liberté. L’attaque a été soigneusement préparée, les hommes ont confiance dans leurs chefs, ils attendent le signal. »

(Source : Témoignage manuscrit d’un résistant de 20 ans, déporté à Buchenwald)