Après l’arrestation d‘Auguste Péchereau, la Gestapo et la section en armes regagnèrent leurs quartiers respectifs, à l’exception d’un soldat feldgrau qui resta de garde à l’intérieur du Café de la Paix, avec pour mission de laisser entrer les visiteurs mais de les empêcher de sortir.
Sur le coup de neuf heures, un jeune homme imprudent appartenant à la Résistance entra un panier sous le bras. Il fut immédiatement happé par le cerbère et sommé d’expliquer ce qu’il venait faire ici. Il répondit calmement qu’il venait livrer des pommes (son panier en était plein).
L’autre semblait satisfait de cette explication mais lui interdit de repartir, car il convenait de voir auparavant des Messieurs de la « Polizei » qui n’allaient pas tarder.
L’homme au panier, très inquiet – on le serait à moins – fit comprendre au soldat avec gestes à l’appui qu’il aimerait bien aller aux toilettes. Le teuton lui en donna l’autorisation, et voilà le visiteur partant vers le fond de la cour avec son panier sous le bras. Passant devant la cuisine, il remit le contenu de celui-ci à la femme d’Auguste, avec mission pour elle de détruire de toute urgence les documents placés sous les pommes. Ma mère s’exécuta immédiatement et les jeta dans la cuisinière qu’elle venait d’allumer.
Deux heures plus tard, la Gestapo était de retour et procéda à l’interrogatoire du jeune homme. Il tint ferme sur sa livraison de pommes. Celle-ci ayant été confirmée par la sentinelle, il fut relâché et… court encore.
Nul n’a jamais su qui il était, ni ce qu’il devint par la suite. Même après la guerre, il n’osa jamais remettre les pieds dans cette maison où il avait dû avoir si peur.
(Source : Manuscrit « Les Péchereau » – André Péchereau)